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Report de l’audience de Martine Landry : Le gouvernement doit mettre fin au « délit de solidarité » [Communiqué de presse Anafé / Amnesty International France]
lundi 8 janvier 2018
Amnesty International France (AIF) et l’ANAFE (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers) réitèrent leur soutien à Martine Landry dont le procès pour « délit de solidarité » a été reporté, ce jour, au 14 février par le tribunal correctionnel de Nice.
Elles appellent le gouvernement à modifier la législation pour rendre impossibles les poursuites pénales sur le fondement du « délit de solidarité ».
« Le projet de loi ʺAsile et Immigrationʺ à venir doit être l’occasion pour le gouvernement de mettre en conformité la loi française avec le droit international afin d’exclure toute possibilité de poursuite des personnes qui apportent leur aide sans en tirer un « avantage financier ou autre avantage matériel », comme l’exige le protocole de Palerme ratifié par la France en 2002 », déclare Sylvie Brigot-Vilain, directrice d’AIF.
Les deux organisations rappellent que l’intervention de Martine Landry à la frontière a été dictée par le renvoi illégal vers l’Italie de deux mineurs isolés étrangers en dépit de la protection dont ils auraient dû bénéficier en tant que mineurs.
« Le procès de Martine met en lumière les violations quotidiennes des droits des personnes exilées à la frontière franco-italienne. Il y a urgence à ce que l’administration française permette aux réfugiés se présentant à cette frontière d’enregistrer leur demande de protection, qu’elle mette fin aux privations de liberté et aux renvois illégaux et surtout qu’elle prenne en charge les mineurs isolés étrangers », souligne Alexandre Moreau, président de l’ANAFE.
Enfin, nos organisations demandent l’instauration d’une politique migratoire protectrice des personnes exilées.
Informations complémentaires
Martine Landry est membre d’Amnesty International depuis 2002. Elle est également la référente régionale Provence-Alpes-Côte d’Azur sur la question des réfugiés et migrants depuis 2011 et chargée d’une mission d’observation en zone d’attente pour AIF. En parallèle, elle participe aux missions militantes de conseil aux demandeurs d’asile et d’accompagnement dans l’accès à leurs droits, missions pour lesquelles elle a bénéficié de plusieurs formations.
Par ailleurs, en dehors de ses activités pour AIF, Martine Landry est engagée au sein de différentes associations locales et nationales pour la défense des migrants et des réfugiés dont l’Anafé.
Travaillant avec l’Anafé depuis de nombreuses années dans le cadre de sa mission d’observation en zone d’attente pour AIF, Martine Landry est membre individuelle de l’Anafé depuis 2017. Elle participe activement à la mission d’observation de l’Anafé à la frontière franco-italienne.
Il lui est reproché d’avoir « facilité l’entrée de deux mineurs étrangers en situation irrégulière ». Elle risque jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende.
Résumé des faits
Le 28 juillet 2017, la police italienne a renvoyé, à pied, deux mineurs isolés étrangers vers la France. Martine Landry les a récupérés au poste frontière Menton/Vintimille du côté français pour les accompagner à la police aux frontières (PAF), munie des documents attestant de leur demande de prise en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE). Les deux mineurs, tous deux âgés de 15 ans et d’origine guinéenne, ont par la suite été pris en charge par l’ASE.
Le 31 juillet, Martine Landry s’est rendue à la PAF de Menton suite à l’interpellation et au transfert de onze migrants. Ce jour-là, elle se voit remettre une convocation pour une audition le 2 août. Le lendemain, Martine Landry reçoit une convocation du Tribunal correctionnel de Nice. Elle devait être jugée le 8 janvier pour « avoir facilité l’entrée de deux mineurs étrangers en situation irrégulière […], en ayant pris en charge et convoyé pédestrement ces deux mineurs du poste frontière côté Italie au poste frontière côté France ». Son audience a été renvoyée au 14 février 2018.
Droit international applicable
Le 29 octobre 2002, la France a ratifié le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, mer et air, additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée. Ce texte définit le trafic illicite de migrants comme « le fait d’assurer, afin d’en tirer, directement ou indirectement, un avantage financier ou un autre avantage matériel, l’entrée illégale dans un État [...] d’une personne qui n’est ni un ressortissant ni un résident permanent de cet État » (souligné par nous).
En posant la condition d’en retirer un avantage financier ou un autre avantage matériel, les auteurs de ce texte ont clairement entendu exclure les activités des personnes apportant une aide aux migrants pour des motifs humanitaires ou en raison de liens familiaux étroits. L’intention n’était pas, dans le Protocole, d’incriminer les activités de membres des familles ou de groupes de soutien tels que les organisations religieuses ou non gouvernementales. Cette intention est confirmée par les travaux préparatoires des négociations en vue de l’élaboration de la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée et des Protocoles s’y rapportant (2008), p. 514 - (Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, Travaux préparatoires
Enquête d’Amnesty International à la frontière franco-italienne « Des contrôles aux frontières du droit » : https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/frontiere-franco-italienne-des-controles-aux-frontieres
Note de l’Anafé sur le « rétablissement des contrôles aux frontières internes et état d’urgence - Conséquences en zone d’attente » : http://www.anafe.org/spip.php?article412