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Brève 2013 - PAF de Marseille - quand l’intransigeance frôle l’absurdité

lundi 3 novembre 2014

Police aux frontières de Marseille : quand l’intransigeance frôle l’absurdité

A Marseille, la police aux frontières (PAF) peut faire preuve d’un manque de discernement allié à un degré de suspicion sans égal. L’expérience vécue par Noureddine et sa famille à l’aéroport de Marseille-Provence nous l’a démontré une fois de plus. A croire que, pour la PAF, la possibilité pour un étranger d’entrer sur le territoire français dépend en grande partie de son pays de provenance. N’est pas touriste qui veut.

Noureddine vit confortablement à Agadir, au Maroc, avec sa femme Rachida et son fils de 18 mois. Dans le cadre de ses activités commerciales il se déplace régulièrement et sans encombre entre le Maroc et la France. Alors que Noureddine et sa femme attendent un heureux événement dans les mois à venir, ils décident de passer trois semaines en France pour des vacances en famille. Ils souhaitent passer quelques jours à Marseille puis rejoindre Paris, la ville « la plus touristique du monde ». Ils étaient loin de s’imaginer que le seul lieu « touristique » qu’ils « visiteraient » serait la zone d’attente de Marseille.

Arrivée à l’aéroport de Marseille-Provence, la famille est contrôlée par les agents de la PAF qui jugent en premier lieu les motivations de séjour suspicieuses. Ils procèdent alors à un examen plus approfondi de leurs documents et décrètent que la famille marocaine ne possède pas les garanties suffisantes pour son séjour touristique en France. Noureddine, habitué à la procédure, avait pourtant bien préparé son voyage : il s’était assuré d’être en possession des passeports, de visas en cours de validité, d’une assurance, d’une réservation d’hôtel couvrant les dates de son séjour, d’un billet de retour 20 jours plus tard et d’une somme de 1775 euros qu’il estimait suffisante pour cette période. Malheureusement, ce n’est pas suffisant.

Pour voyager en France, il faut disposer de 65 euros par jour de séjour et par personne, lorsqu’on est hébergé à l’hôtel. Noureddine aurait donc dû être en possession de la coquette somme de 3900 euros pour subvenir aux frais des trois membres de sa famille. Une médiatrice de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, présente en zone d’attente ce jour-là, nous a ainsi affirmé que la PAF aurait exigé un montant supplémentaire de 1300 euros pour leur fils de 18 mois. La police reproche donc à Noureddine un défaut de ressources en ce qu’il lui manquait 2125 euros pour entrer sur le territoire. Et, même si un ami a pu leur apporter 1200 euros supplémentaires, cela demeure insuffisant pour la police qui, de surcroît, refuse catégoriquement de régulariser toute situation au-delà du contrôle frontalier.

Noureddine, sa femme enceinte et leur enfant d’un an et demi se sont donc vus refuser l’entrée sur le territoire français et placer en zone d’attente dans des conditions proches de celles d’un régime pénitentiaire, le temps pour la police d’organiser leur renvoi vers le Maroc. Rachida, entre deux sanglots, a pu contempler une architecture moderne pittoresque se réduisant à une chambre de 8m², flâner plaisamment dans la cour grillagée prévue à cet effet et goûter aux merveilles de la gastronomie typique des compagnies aériennes. Leur chef presque étoilé opérant ce jour-là n’a d’ailleurs pas pris la peine d’adapter ses plateaux repas aux besoins de l’enfant en bas âge qui allait les déguster.

Alors même que la PAF de Marseille affirme faire preuve de discernement, notamment envers des personnes qui viennent fréquemment en France, son inflexibilité peut engendrer des décisions absurdes et virer à l’intransigeance.

Tant pis donc pour cette famille qui, après avoir fait l’expérience de l’enfermement à la française, sera refoulée vers Casablanca le jour même et devra « retenter sa chance » dans les jours suivants… A condition bien sûr qu’ils ne décident – au vu de l’accueil qui leur a été réservé à la frontière – de changer de destination pour leurs vacances.

Corentin, Intervenant Anafé, 2013

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